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Enquête sur les silences obtenus par l'enseignement et la psychiatrie
12 novembre 2013

4. Rien, rien que l'espace d'une malheureuse cloison

C'était donc un temps de franche rigolade, que ce mois de juillet 1983, pour l'écrivaine et l'écrivain que nous étions, Françoise et moi. Voilà, de plus, que nous entamions notre premier livre à rédiger en commun...

Entamer, le mot n'est pas le bon. Il y avait déjà quatre ans que nous avions commencé à nous documenter, à la fois sur l'histoire de l'enseignement et sur celle de la psychiatrie, avec cette rencontre du cent-cinquantième anniversaire de  la loi Guizot sur l'ensei-gnement primaire (1833) et du cent-quarante-cinquième anniversaire de la loi de 1838 sur l'internement psychiatrique.

De fait, la première phrase que nous allions écrire, ici, dans ce très vétuste hôtel de Mâcon, la voici :

"Le 25 juillet 1830, Charles X, roi de France, donnait sa signature à une série d'or-donnances. Parmi les nouvelles mesures, la plus lourde de conséquences était sans doute celle qui allait modifier la loi électorale."

Lourde de conséquences, une autre mesure qui se préparait si près de nous... qui n'en étions encore qu'à une vague affaire de plomberie qui nous avait tout de même un peu mis sens dessus dessous... Ainsi, comme il est écrit dans "La clef des champs" (page 98) :

"Face à de tels événements, on doit bien penser que les quelques mots échangés avec l'occupant de la chambre voisine qui plaisantait sur les "horaires changeants de la marée montante" ne pesèrent qu'assez peu. Pire : le lendemain, arpentant une quel-conque rue, nous n'aperçûmes pas la silhouette sombre qui venait dans notre direction, et il s'en fallut alors de peu que nous n'omissions de répondre à ce salut dont on verra plus loin qu'il s'est inscrit au fer rouge dans nos mémoires réunies.
Le lendemain, qu'était-ce ? Le 14, le 15 juillet 1983 ? La gendarmerie le sait mieux que nous... Quoi qu'il en soit, ce matin-là, nous avions quitté la chambre vers 10 heures. À midi, nous y étions revenus, prêts à reprendre notre tout jeune manuscrit. Revenus, ou presque... Car, avant de pousser la porte, il faut évidemment saluer le... gendarme que voici... Que peut-il bien faire là ?
« Vous n'avez rien entendu, pendant la nuit ?
   - Non...
 »
La porte de la chambre voisine est entrouverte... Un second gendarme... Plus bas, à l'horizontale, une jambe nue...
« Que s'est-il passé ?
    - Il s'est pendu. »
"

Il y aurait donc effectivement... une corde de pendu. Ce que nous aurions évidemment perdu de vue... tant nous n'avions plus d'yeux que pour l'horreur de ces quelques dizaines de centimètres qui nous auront, à tout jamais, permis de côtoyer le pire dans l'ignorance la plus totale d'un compte à rebours si dérisoire et si terrible.

Nous te saluons et te re-saluons ainsi que nous l'avons si souvent fait depuis ce temps, ami inconnu du Mâcon de juillet 1983, notre frère d'écriture, à la vie, à la mort.

Michel J. Cuny

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Commentaires
Enquête sur les silences obtenus par l'enseignement et la psychiatrie
  • Quels rapports l'enseignement et la psychiatrie entretiennent-ils avec la vérité ? Mais comment définir celle-ci dans un monde où règne l'exploitation de l'être humain par l'être humain ? Question brûlante dans ces temps de très grand trouble.
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